ETAT DE DROIT – ETAT D’EXCEPTION
NOTION D’ETAT DE DROIT
La notion d’État de droit est double. Dans les théories rationnelles du droit, l’État de droit est synonyme d’ordre juridique hiérarchisé. Tout Etat est un Etat de droit selon Hans Kelsen. De facto, cette forme d’organisation politique fait référence au droit tant public que privé garanti par cet ordre politique.
L’État de droit fait aussi référence à une séparation entre la société civile et l’État. La notion d’État de droit s’utilise pour désigner un type particulier de gouvernement, dont l’organisation interne garantit les libertés individuelles. L’on note la primauté de la loi sur les autres formes de production du droit construit comme un ordre hiérarchisé et systématisé. La distinction entre le domaine public et le domaine privé est assurée par une séparation des pouvoirs qui garantit une certaine autonomie de l’appareil judiciaire.
A noter qu’au 20e siècle, l’existence de l’État de droit ne s’applique qu’à la partie « privilégiée » de la population et l’on ne peut que constater que l’État de droit est alors aussi un Etat de non droit pour certaines classes sociales.
Le rapport hiérarchique entre les différents pouvoirs législatif et exécutif se modifie en raison de l’Etat social qui évolue. Le démantèlement de l’État prend appui sur l’extension de la tutelle qu’exerce le pouvoir exécutif sur le Parlement et la nouveauté réside essentiellement dans l’instrumentalisation du pouvoir judiciaire par le pouvoir exécutif et la subordination de la justice à l’appareil policier.
L’évolution depuis les attentas du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis des codes pénaux et des procédures pénales constitue une remise en cause de l’État de droit.
NOTION D’ETAT D’EXCEPTION
Dans l’État de droit, existe une pyramide des normes ie une hiérarchie des normes juridiques avec au sommet la Constitution. Chaque norme trouve sa base dans une norme supérieure tout en étant le fondement de la norme inférieure.
Considérer comme un fait purement politique la notion d’État d’exception serait une approche facilitée entendu que juridiquement elle est difficile à cerner puisqu’elle fait référence à une structure nouvelle non connue et inexistante en droit.
L’État d’exception illustre la violence qui entre dans le domaine juridique. La théorie de l’État d’exception construite par Carl Schmitt s’oppose à la théorie formelle du droit. Il fonde la souveraineté non sur la capacité d’imposer une norme mais sur la décision libérée de toute obligation normative. L’exception est « là où la décision se sépare de la norme juridique » qui révèle l’autorité de l’État qui est souverain et décide d’une situation exceptionnelle. Selon Schmitt, la souveraineté de l’État ne consiste pas dans le monopole de la coercition ou de la domination mais bien dans le monopole de la décision. Cette définition apparaît réductrice pour caractériser l’État entendu que l’auteur ne peut rendre compte du caractère organique de la souveraineté de l’État nationale, de l’indépendance qui existe entre la souveraineté interne et externe et l’articulation des différentes institutions.
Suite à la désarticulation de l’Etat-nation et de l’intégration de cette structure résiduelle dans une forme de pouvoir impérial, la problématique de Schmitt présente un intérêt nouveau entendu que la décision concernant l’exception s’inscrit dans l’ordre juridique dès lors que l’État suspend le droit au nom de sa conservation.
L’État d’exception constitue une suspension généralisée du droit. Il s’agit d’un point de non retour dans le démantèlement du droit de l’État de droit et naît un système où la suspension du droit acquiert un caractère constituant.
Illustrations -
Aux Etats-Unis –
. dérogations au droit commun
. les Etats-Unis s’instituent « gendarmes du net »
les Tribunaux américains se reconnaissent une compétence universelle en matière de poursuite des délits informatiques
le Département de la justice s’octroie le droit de poursuivre un pirate informatique quelque soit sa nationalité ou le lieu du délit
les USA peuvent déconnecter un pays du réseau (ex:la Somalie)
. Guantanamo
Guantanamo est un centre de détention militaire de haute sécurité sur la base navale américaine de Guantanamo dans le sud-est de Cuba. Y sont détenues de personnes qualifiées de « combattant illégal » capturées par l’armée américaine dans les opérations contre le terrorisme islamiste.
Le président George W. Bush justifie le choix de ce centre afin de fondement juridiquement la décision de refuser de soumettre les détenus au système judiciaire fédéral américain en raison de l’extraterritorialité de la base. Il s’agit d’un acte dérogatoire au droit commun, de l’instauration d’un ordre politique nouveau. A souligner que la Cour suprême reconnaît aux prisonniers le droit de contester leur détention devant les tribunaux américains ; les Américains détenus ont le statut de « combattant ennemi » mais mentionne l’interdiction de les détenir indéfiniment. Toutefois, elle ne se prononce pas sur les conditions de la détention.
En Europe -
. incrimination commune du terrorisme
. définition de l’organisation terroriste
. délit d’intention
. coopération entre les pays – police, douane, autorités judiciaires
. rapprochement des règles de droit pénal et instauration du mandat d’arrêt européen
. accord sur l’extradition
. généralisation des procédures d’exception
. changement d’orientation : les premiers textes avaient pour but de favoriser la coopération entre les Etats dans la lutte contre certains actes dangereux. Aussi, il importait de distinguer les actes à caractère politique des actes sans. Avec la décision-cadre de l’Union européenne relative à l’incrimination terroriste, ce ne sont pas les actes concrets qui déterminent le caractère terroriste de l’infraction mais un élément moral construit sur la base d’une définition large qui fait de la déstabilisation de l’État une spécification du terrorisme.
Dr LV